Analyses
Une économie mondiale en dents de scie
|
Global Fixed Income Bulletin
|
• |
février 20, 2025
|
février 20, 2025
|
Une économie mondiale en dents de scie |
Le mois de janvier a été satisfaisant pour les marchés obligataires. Les premiers jours du mandat de Donald Trump ont fait peser une certaine incertitude sur les marchés mondiaux ; pour autant, ces derniers l’avaient sans doute anticipé puisque peu de mouvements d’ampleur ont été observés. Les statistiques économiques continuent de jouer un rôle crucial et la divergence entre les conditions économiques et les politiques des banques centrales est devenue de plus en plus évidente, l’économie américaine semblant maintenir une position dominante à l’échelle mondiale.
Les emprunts d’État des pays développés ont enregistré des performances mitigées au cours du mois. Le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans a reculé de 3 points de base, une baisse moindre par rapport à celui des emprunts d’État canadiens et surtout britanniques. En revanche, les rendements ont augmenté au Japon, en Allemagne, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Sur les marchés émergents, les rendements ont globalement diminué durant le mois. Au Mexique et au Brésil, ils ont baissé respectivement de 34 et 36 pb.
Le dollar a peu fluctué au cours du mois, tandis que le yen japonais et la couronne norvégienne ont signé les meilleures performances parmi les devises des marchés développés. En revanche, la livre sterling et le dollar canadien ont connu les plus fortes dépréciations. Dans l’ensemble, les devises émergentes ont mieux performé.
Parmi les obligations d’entreprises, les titres Investment Grade libellés en euros ont surperformé leurs homologues libellés en dollars, tandis que les obligations High Yield américaines ont surperformé leurs équivalents en euros. Durant le mois, les spreads se sont resserrés sur les deux segments. Sur les marchés titrisés, les spreads de crédit ont continué de se resserrer, tandis que les spreads des MBS d’agences sont restés inchangés.
Perspectives des marchés obligataires
Les marchés vont désormais devoir apprendre à décrypter le mode de fonctionnement et les objectifs de Donald Trump, car jusqu’à présent ce dernier a émis - et annulé ou reporté - des directives à un rythme effréné. Dès les premiers jours de son mandat, la nouvelle administration a fait part de son intention de tenir autant de promesses de campagne que possible en enchaînant une multitude de décrets. Dans un premier temps, les marchés se sont réjouis que les premiers efforts se concentrent sur l’immigration et l’efficacité du gouvernement, tout en laissant de côté le sujet des droits de douane. Malheureusement, ce répit a été de courte durée. Le 31 janvier, Donald Trump a annoncé l’imposition immédiate de droits de douane de 25 % sur tous les produits mexicains et canadiens, avec une exclusion de 10 % pour l’énergie canadienne, ainsi que de nouveaux droits de douane de 10 % sur les produits chinois. Bien que les discours de campagne aient laissé pressentir une posture agressive sur les droits de douane, les marchés ont néanmoins été pris au dépourvu par l’annonce, déstabilisés par l’ampleur des taxes et le timing souhaité. Heureusement, mais sans trop de surprise, le Mexique et le Canada ont pu désamorcer le risque immédiat et négocier avec l’administration américaine le report d’un mois de la mise en œuvre des droits de douane. Bien que l’augmentation des taxes sur les produits chinois reste d’actualité, cela n’est ni surprenant ni trop inquiétant en soi, étant donné le souhait du gouvernement américain de rompre avec la Chine.
Les marchés financiers ont enregistré une performance satisfaisante en janvier, faisant fi des inquiétudes suscitées par la prise de fonction de la nouvelle administration. L’avenir reste assez incertain. La situation est complexe dans la mesure où l’économie américaine a « atterri » – ce qui signifie que malgré le discours sur une inflation durable et un risque de récession naissant, les performances de l’économie se sont avérées remarquablement stables. Il est possible que la croissance ait atteint un meilleur équilibre, à savoir une croissance réelle de 2,5 % assortie d’un taux d’inflation de 2,5 % et d’un marché du travail stable affichant le plein emploi. Et la politique de la Réserve fédérale (Fed) pourrait avoir, grâce à ses compétences et/ou par chance, atteint le taux directeur idoine pour maintenir cette stabilité. Ainsi, si tous les voyants semblent au vert pour l’économie américaine (avec ou sans nouvelles baisses de taux), la volonté farouche de Donald Trump de perturber la politique commerciale et d’influencer potentiellement les mesures de la Fed n’est pas favorable aux prix des actifs qui, selon la plupart des calculs, ont totalement, ou presque, atteint leurs objectifs de valorisation, aussi bien sur le marché du crédit que sur le marché actions. En dehors des États-Unis, les rendements des emprunts d’État à 10 ans dans la plupart des pays semblent satisfaisants compte tenu des trajectoires économiques et politiques. Selon un vieil adage, les cycles économiques ne meurent pas de vieillesse, ils sont « assassinés », généralement par des chocs dus à des erreurs politiques, à des événements exogènes ou à des bulles spéculatives. Dans ce cas, la fixation des prix du marché sur toute une série d’actifs dépend de l’absence d’erreurs politiques. Avec l'accent apparemment implacable mis par l'administration Trump sur l'immigration et le commerce, le risque que la politique perturbe l’équilibre actuel s’est accru. Cela dit, les rendements des bons du Trésor américain à 10 ans devraient rester stables, sous réserve des mises en garde mentionnées ci-dessus.
La question essentielle est de savoir si l’administration Trump peut mettre en œuvre ses politiques sans provoquer un recul des prix des actifs. Dans un premier temps, le marché a réagi positivement à la victoire de Donald Trump, considérant que même si les mesures liées au commerce et à l’immigration n’étaient pas favorables à la croissance et à un taux d'inflation contenu, elles seraient compensées par d’autres mesures positives (déréglementation, réductions d’impôts) qui, dans l’ensemble, profiteraient à l’économie. Cette hypothèse est aujourd’hui remise en question, car l’administration a décidé de mettre d’abord en œuvre les mesures négatives au plan économique, sachant que celles qui seront favorables à la croissance prendront plus de temps à être déployées et que leur impact sera donc décalé. En outre, compte tenu de la faible majorité républicaine au Congrès, il est difficile d’être trop confiant quant à l’ampleur du programme en faveur de la croissance qui sera adopté. Enfin, s’agissant plus particulièrement la politique commerciale, nous ne connaissons toujours pas le ou les objectifs ultimes. La nouvelle administration a défini trois objectifs : (1) élaborer un outil de négociation pour atteindre d’autres objectifs, tels que la lutte contre la drogue et l'immigration clandestine ; (2) collecter des capitaux, soit pour financer de nouvelles baisses d’impôts, soit pour les dépenser ailleurs ; et (3) réduire la dépendance commerciale américaine pour basculer vers une économie plus autarcique. On ne sait pas encore très bien lequel de ces éléments est le plus important pour la nouvelle administration. Cette incertitude rendra l'investissement complexe dans les prochains mois, au fur et à mesure que les véritables objectifs de l'administration seront dévoilés.
Qu’est-ce que cela implique en matière de politique monétaire ? L'incertitude entourant les droits de douane se traduit par une politique monétaire américaine moins lisible. Les droits de douane - qui pourraient s’avérer importants selon les directives de l'administration Trump - doivent être considérés comme une taxe sur la consommation (à l'instar de la taxe sur la valeur ajoutée, TVA, utilisée dans une grande partie du monde) et comme un choc d'offre négatif. L'économie américaine subirait alors un choc qui réduirait la croissance et ferait grimper l'inflation, tandis que l’augmentation d’incertitude pourrait à lui seul maintenir l'inflation à un niveau plus élevé qu'elle ne l'aurait été dans d'autres circonstances. Ce scénario devrait inciter la Fed à la prudence quant à de nouveaux abaissements des taux directeurs. Bien que nous nous soyons montrés sceptiques quant à la possibilité que la Fed procède à deux baisses de taux en 2025, cette éventualité restait tout à fait envisageable. Aujourd’hui, deux baisses semblent encore moins probables et, à supposer que des droits de douane soient finalement appliqués (nous pensons qu’une taxe de 10 % sur l’ensemble des produits ne semble pas incompatible avec le discours ou les objectifs de la nouvelle administration), l’impact pourrait convaincre la Fed de cesser complètement de baisser ses taux. L’inverse est vrai pour la plupart des autres pays. Comme nous l’avons vu avec le Canada, le marché a immédiatement intégré dans ses prix des baisses de taux supplémentaires agressives pour compenser l’impact déflationniste des droits de douane sur l’économie canadienne. Ce taux de réaction relatif suggère, à première vue, une préférence pour les emprunts d’État non américains (à l’exception du Japon, dont la banque centrale relève ses taux quoi qu’il arrive). Cependant, un contexte de plus en plus difficile pour l’économie mondiale et l’appréciation probable du dollar signifient généralement une baisse des prix des actifs risqués et, surtout, une baisse des rendements du Trésor américain. Si l’on ne prend pas en compte ces éléments, on obtient une légère sous-pondération du risque de taux d’intérêt américain par rapport au reste du monde. Compte tenu de toutes les incertitudes liées aux perspectives économiques et politiques, nous estimons qu’une stratégie prudente en matière de taux d’intérêt est la plus judicieuse pour l’instant.
Si les marchés du crédit ont quelque peu vacillé à l’annonce des droits de douane, ils ont rapidement retrouvé leur équilibre, ce qui témoigne de la solidité des fondamentaux du marché obligataire. Les incertitudes et les valorisations élevées nous incitent à davantage de prudence. Il n’en demeure pas moins, d’autant plus au vu de l’incertitude liée à la politique de l’administration Trump, qu’il sera difficile pour les spreads de se resserrer davantage par rapport aux niveaux actuels. Cependant, nous pensons que cela n'enlève rien au potentiel de performance totale de ces obligations. Compte tenu des fondamentaux toujours solides, de l’appétit apparemment vorace des investisseurs à l’égard de l’offre et de la politique d’assouplissement des banques centrales qui ne se dément pas, il est difficile d’être sous-exposé. Dans ce contexte, il convient d'être très sélectif et de gérer activement les expositions aux notations, aux pays et aux secteurs afin d'atténuer autant que possible l’impact inévitable des problèmes qui risquent de survenir au cours des 12 prochains mois. Nous nous efforçons d’éviter les entreprises et les secteurs à risque en raison de sous-performances individuelles, de problématiques à long terme ou d’une agressivité accrue de la part des équipes de direction. Parallèlement, nous cherchons à accroître le rendement du portefeuille autant que possible, mais sans sacrifier la performance (sous l’effet de pertes de crédit ou d’un élargissement des spreads). Nous continuons d’identifier des opportunités plus intéressantes sur des émetteurs américains et des banques européennes dont les titres sont libellés en euros, bien que nous ayons réduit de manière sélective les positions surpondérées sur la base de la surperformance.
Le crédit titrisé reste notre secteur favori. Mais même dans ce secteur, la récente série de bons résultats réduit les performances relatives et absolues. Si de nombreuses composantes de ce secteur (titres adossés à des créances commerciales, titres adossés à des créances hypothécaires résidentielles, titres adossés à des actifs) semblent attrayantes à notation égale par rapport au crédit, les spreads absolus, comme pour le crédit, se rapprochent - par rapport à leur propre historique - des niveaux où il est moins intéressant d’adopter un positionnement long. Cela dit, nous pensons que la dynamique technique et les fondamentaux restent convaincants. Les nouvelles émissions sont souvent sursouscrites plusieurs fois, ce qui rend difficile l’accumulation de positions importantes. Face au bruit de marché et aux incertitudes actuels, nous pensons que ce segment a toutes les chances d’enregistrer des performances solides. Concernant les émissions d’agences, les titres à coupon élevé restent plus attractifs que les obligations d’entreprises investment grade et les autres titres à coupon d’agences, et ils devraient selon nous surperformer les bons du Trésor américain. La sélectivité reste le maître-mot.
Les obligations des marchés émergents (ME) se sont bien comportées au début du mois de février, la guerre commerciale avec le Mexique ayant été (temporairement) désamorcée. La question est de savoir combien de temps cela va durer. Il est fort possible que les droits de douane qui ont été reportés finissent par entrer en vigueur. Par conséquent, nous ne pensons pas que l’accalmie actuelle en termes de négativité ou la bonne performance récente des prix se poursuivra indéfiniment. Cela dit, nous pensons que les pays dotés de perspectives économiques prometteuses, d’une croissance décente, d’une inflation en baisse, de rendements réels élevés et d’une banque centrale capable et désireuse de réduire les taux d’intérêt – malgré la réorientation des politiques américaines – sont susceptibles d’enregistrer de bonnes performances. La sélection individuelle des pays et des titres reste essentielle. Nous gardons un œil sur les obligations brésiliennes libellées en real à mesure que les perspectives budgétaires et monétaires évoluent en 2025. Nous pensons également que certains des pays à haut rendement ayant des liens commerciaux plus faibles avec les États-Unis, comme l’Égypte, devraient continuer à tirer leur épingle du jeu.
Sur les marchés des changes, le dollar américain devrait rester stable dans les mois à venir, malgré sa récente correction suite au report des droits de douane du Mexique et du Canada. La faiblesse du dollar devrait être passagère. Malgré sa valorisation élevée, ses fondamentaux restent solide quand la plupart des autres devises à travers le monde semblent nettement plus en difficulté. Une politique américaine potentiellement agressive en termes de droits de douane exacerberait la vigueur du dollar, surtout si d’autres pays laissent leur monnaie se déprécier pour compenser la hausse des droits de douane en question. Toutefois, une détérioration du marché du travail américain, un affaiblissement général de la croissance ou une diminution de la confiance dans la politique budgétaire américaine pourraient atténuer cet optimisme. L’économie américaine prospère grâce aux flux de capitaux, qui sont le reflet du déficit commercial. Si les investisseurs non américains perdent confiance dans les États-Unis, le fait de financer l’augmentation des investissements tout en supportant le déficit public démesuré pourrait devenir problématique. Ces événements pourraient contraindre la Fed à baisser ses taux de manière plus agressive conformément à son double mandat. La cause la plus vraisemblable d’une dépréciation du dollar serait à chercher du côté des États-Unis. Mais avec le déploiement imminent de nouveaux droits de douane, cela semble peu probable. Il est selon nous judicieux de ne pas sous-pondérer le dollar américain par rapport aux autres devises des marchés développés. Cela dit, il n’est pas inintéressant de prendre des positions sur certaines devises des pays émergents en faisant preuve d’une grande sélectivité.
Taux et devises des marchés développés
Analyse mensuelle :
Dans un premier temps, les rendements des emprunts d’État des pays développés ont augmenté en janvier, dans le sillage de la correction du mois de décembre, avant que l’IPC américain (légèrement plus faible que prévu) et des attentes peu exigeantes de la part des banques centrales n’encouragent un rebond des marchés, ces derniers clôturant le mois pratiquement inchangés. Les courbes de taux ont continué à se pentifier en Europe, mais ont très peu évolué aux États-Unis. Lors de la réunion du FOMC en janvier, la Fed a maintenu sans surprise ses taux inchangés, et Jerome Powell a déclaré qu’il ne voyait pas d’urgence à les réduire à nouveau. Les statistiques économiques américaines sont restées bien orientées, comme en témoignent les 256 000 nouveaux emplois créés en décembre, l’inflation a poursuivi sa baisse, en particulier les composantes des services et du logement. Toutefois, compte tenu de la résistance de la croissance, le marché n’attend la prochaine réduction des taux de la Fed qu’en juin.
De l’autre côté de l’Atlantique, la Banque centrale européenne a réduit ses taux d’intérêt comme prévu et a maintenu sa politique d’assouplissement monétaire, restant d’avis que l’inflation est de mieux en mieux maîtrisée malgré certaines inquiétudes liées aux échanges commerciaux internationaux. Les statistiques économiques sont ressorties légèrement meilleures que prévu, tout en restant cohérentes avec une croissance modeste. Les enquêtes PMI traduisent toujours une récession du secteur manufacturier, en particulier en Allemagne et en France, mais cette situation est compensée par une croissance robuste du secteur des services, soutenue par une forte hausse des revenus des ménages. La BCE devrait réduire ses taux d’intérêt de 85 pb supplémentaires en 2025 car les taux directeurs actuels sont considérés comme restrictifs, les risques pour la croissance sont de plus en plus orientés à la baisse et les investisseurs espèrent que l’inflation continuera à baisser pour se rapprocher de son objectif. En début de mois, les Gilts ont suivi la tendance haussière des taux d’intérêt à l’échelle mondiale, mais ont légèrement surperformé les bons du Trésor US durant la deuxième quinzaine, car les données inflationnistes de décembre sont ressortis plus faibles que prévu et les chiffres de la croissance en général ont été inférieurs aux anticipations.
Sur le marché des changes, le dollar américain a reflété les écarts de taux d'intérêt, s’appréciant au début du mois avant de se déprécier dans le sillage des rendements américains. La hausse de la croissance américaine et la performance des marchés boursiers ont soutenu le dollar, mais l’absence prise de décision sur les droits de douane dès la prise de fonction de Donald Trump a également provoqué un affaiblissement, en particulier par rapport aux principaux partenaires commerciaux. Le yen a bénéficié de la baisse des rendements et d’une posture moins accommodante de la Banque du Japon, tandis que la livre sterling et le dollar canadien ont sous-performé.
Perspectives :
Dans l’ensemble, nous conservons un positionnement neutre sur la duration des marchés développés, à l’exception du Japon, et maintenons une exposition à la pentification des courbes de taux, en particulier aux États-Unis. Nous restons sous-exposés aux États-Unis par rapport au Royaume-Uni et à la Nouvelle-Zélande, où nous pensons que les banques centrales sont susceptibles de réduire davantage leurs taux par rapport à ce qui est actuellement prévu. Nous sous-pondérons également les JGB et conservons une position longue sur les points morts d’inflation au Japon. L’inflation japonaise semble évoluer structurellement à la hausse et la BoJ indique que, selon elle, il est plus probable que l’économie développe une dynamique positive des prix et des salaires. Nous pensons par conséquent que le cycle de hausse des taux sera plus long que ne l’anticipe le marché actuellement. Nous continuons de privilégier le dollar australien et le dollar américain par rapport au dollar canadien, et conservons une opinion positive à l’égard du yen par rapport à l’euro.
Taux et devises des marchés émergents
Analyse mensuelle :
La dette des marchés émergents a enregistré de solides performances en début d’année dans les principaux segments de la classe d’actifs. Les devises émergentes se sont redressées à la faveur de la dépréciation du dollar pendant la majeure partie du mois. Les spreads de crédit souverains se sont resserrés tandis que les spreads des obligations d’entreprises sont restés stables, mais les deux segments ont bénéficié de la baisse des taux du Trésor américain. La Fed a tenu sa première réunion de l’année et a maintenu ses taux inchangés, ce qui était largement attendu. Donald Trump a entamé son mandat avec une série de décrets qui ont entraîné une certaine volatilité du marché, tandis que la politique étrangère et l’avenir des droits de douane restent toujours en suspens. La Colombie a été momentanément frappée de droits de douane en raison des mesures d’expulsion décrétées par les États-Unis, mais ces taxations ont ensuite été abandonnés après des discussions entre responsables politiques des deux pays. La banque centrale du Brésil a relevé ses taux, car l’inflation reste tenace et les dépenses budgétaires se poursuivent. Les investisseurs hésitent toujours à investir dans la dette des marchés émergents, comme le montrent les sorties de capitaux en monnaie locale comme en devises fortes au cours du mois de janvier.
Perspectives :
La dette des marchés émergents a commencé l’année en trombe grâce à la dépréciation du dollar et à la baisse des rendements des bons du Trésor américain. Malgré la décorrélation habituelle entre la politique américaine et les pays émergents, les politiques qui seront déployées pourraient avoir des répercussions négatives. Notre processus d’investissement reste axé sur les fondamentaux de chaque pays. Ainsi, même si la politique étrangère et la politique commerciale restent incertaines à ce stade, nous surveillerons leur impact au niveau national. La Fed a adopté une posture moins accommodante, et nous pourrions assister à des baisses de taux plus sélectives de la part des banques centrales des pays émergents. Mais les écarts de rendement réel entre les pays émergents et les pays développés restent attrayants. En outre, la faiblesse persistante du dollar américain stimulerait les monnaies des pays émergents. La sélection des pays et la recherche d’opportunités d’investissement moins impactées par la politique américaine seront essentielles pour stimuler la performance de la dette des marchés émergents.
Obligations d’entreprises
Analyse mensuelle :
Les spreads des obligations Investment grade européennes se sont resserrés en janvier, soutenus par la bonne orientation des facteurs techniques. La demande d’actifs risqués a été globalement élevée, la plupart des transactions sur le marché primaire affichant des carnets d’ordres bien remplis et des primes limitées pour les nouvelles émissions. L’actualité favorable en termes de droits de douane a encore soutenu les actifs risqués. Le marché a réagi brutalement à un article du WSJ laissant entendre que ces taxes ne seraient pas appliquées immédiatement par l’administration Trump. Toutefois, les droits de douane annoncés le dernier jour du mois concernant le Mexique, le Canada & la Chine risquent d’inquiéter les marchés. Sur le segment des obligations d’entreprises, ces dernières ont commencé à publier leurs résultats pour le quatrième trimestre 2024. Les premières conclusions indiquent que nous allons assister à un nouveau trimestre sans histoire mais très solide pour les banques, sans détérioration majeure de la qualité des actifs ou de la génération de revenus nets. Il est intéressant de noter que les prévisions de bénéfices se sont légèrement améliorées pour les secteurs orientés vers l’exportation, y compris l’industrie manufacturière et les services financiers. Sur le front des opérations de fusions-acquisitions, l’activité au niveau des banques italiennes s’est poursuivie avec le lancement par Monte dei Paschi d’une offre publique d’achat de 13,3 milliards d’euros sur son grand rival national Mediobanca, offre rapidement rejetée par cette dernière. Le marché reste à l’affût des tendances structurelles à mesure que les entreprises publient leurs résultats.
Les performances des marchés américain et mondial high yield ont été solides en janvier, grâce à une demande globalement forte, à un calendrier du marché primaire qui a mis du temps à se mettre en place et à un léger recul des rendements des bons du Trésor américain à 5 ans et des Bunds allemands au cours de la seconde moitié du mois. Avec une pénurie d’émissions et une demande abondante au cours des trois premières semaines de l’année, les titres bêta de moindre qualité ont tiré la performance. La dynamique s’est inversée en fin de mois, lorsqu’une vague de financements liés à des acquisitions a ravivé le marché primaire et que les valorisations des structures moins bien notées du secteur de la télévision ont subi une légère pression. La décision de la Fed de maintenir son taux directeurs en janvier et celle de la Banque centrale européenne de réduire le sien d’un quart de point ont été clairement annoncées et n’ont suscité que peu de réactions. À la fin du mois, le marché s’est concentré sur l’éventualité de droits de douane imminents.
En janvier, les obligations convertibles mondiales ont généré des performances élevées par rapport aux actions et nettement supérieures à celles des autres classes d’actifs obligataires. Les rendements ont bénéficié de solides performances aux États-Unis et en Asie, faisant suite à une correction en décembre. Le montant des émissions a été décevant (3,2 milliards de dollars, soit la moitié de la moyenne historique) après un mois de décembre très impressionnant, en partie à cause de l’incertitude suscitée par l’investiture de Donald Trump. La décision de la Fed de maintenir ses taux directeurs en janvier et celle de la Banque centrale européenne de réduire les siens d’un quart de point ont été clairement annoncées et n’ont suscité que peu de réactions. Le marché des obligations convertibles s’est également relativement bien comporté après la correction des valeurs technologiques provoquée par DeepSeek. À la fin du mois, le marché s’est concentré sur les menaces d’évolution de la politique commerciale.
Perspectives :
Notre scénario central reste optimiste vis-à-vis du crédit et repose sur l’anticipation d’un atterrissage en douceur (« soft-landing »), des politiques budgétaires au service de la croissance, de l’emploi et de la consommation, et des fondamentaux d’entreprise solides, soutenus par des stratégies assez prudentes. Le niveau gérable des émissions nettes et la quête effrénée de « rendement global » sur le segment du crédit IG devraient imprimer une dynamique technique positive. Au vu des spreads de crédit, le marché semble offrir un potentiel de valorisation, mais le portage est bel et bien le principal moteur de performance, avec des gains potentiels supplémentaires grâce à l’allocation sectorielle et, de plus en plus, à la sélection de titres. Toutefois, compte tenu des incertitudes à moyen terme, nous ne parions pas sur un resserrement important des spreads.
Nous avons une vision relativement équilibrée du marché du High Yield pour le premier trimestre 2025. Au-delà des épisodes de volatilité que nous anticipons, nous avons conscience que les rendements restent attractifs d’un point de vue historique. Néanmoins, compte tenu des spreads, les valorisations du marché high yield sont élevées et la classe d’actifs n’a pas le droit à l’erreur. Notre conclusion est le fruit d’une analyse approfondie de plusieurs facteurs : l’évolution des politiques monétaires mondiales, la croissance économique américaine et mondiale, la santé de la consommation, les fondamentaux des émetteurs high yield, les facteurs techniques et les valorisations. Nous pensons qu’en moyenne le rendement rémunère correctement le risque de crédit sous-jacent, mais qu’une exposition aux titres de moins bonne qualité ne sera pas correctement récompensée.
Nous restons optimistes à l’égard du marché mondial des obligations convertibles en ce début de mois de février. Les facteurs techniques sont solides. En effet, les obligations convertibles ont conservé un profil équilibré, les taux d’intérêt restent relativement élevés, les valorisations des actions ont augmenté en 2024 et les entreprises ont toujours autant de besoins de financement. Après une année 2024 prolifique en matière de nouvelles émissions d’obligations convertibles, nous pensons que cette tendance va se poursuivre dans le sillage des baisses de taux des banques centrales et sous l’effet de l’arrivée à maturité des obligations émises pendant la crise sanitaire. Enfin, nous anticipons une hausse de la volatilité cette année avec des tensions géopolitiques et régionales persistantes, alors que les marchés cherchent à décrypter les politiques de l’administration américaine.
Titrisation
Analyse mensuelle :
En janvier, les spreads des MBS d’agences (titres adossés à des crédits hypothécaires) se sont élargis de 3 pb et se situent désormais à +138 pb par rapport aux bons du Trésor US. Compte tenu du resserrement important des spreads sur d’autres segments du crédit, les MBS d’agences restent l’un des seuls segments obligataires affichant des valorisations attractives. Les avoirs en MBS de la Fed ont diminué de 27,5 milliards de dollars en janvier, à 2 210 milliards de dollars. Ils ont diminué de 486,5 milliards de dollars par rapport à leur pic de 2022. Après une légère baisse des encours en décembre, les banques américaines ont poursuivi leur augmentation progressive : les avoirs en MBS des banques américaines ont augmenté de 6 milliards de dollars pour atteindre 2 649 milliards de dollars en janvier ; ils restent en baisse de 323 milliards de dollars depuis le début de l’année 2022. Malgré des niveaux d’offre élevés, les spreads de crédit titrisé se sont sensiblement resserrés en janvier. Cependant, les spreads des obligations d’entreprise IG américaines et des MBS d’agences sont restés inchangés ou ont légèrement augmenté. Après un mois de décembre calme, les émissions titrisées ont été significatives en janvier, en grande partie en raison des volumes réduits pendant les fêtes de fin d’année ; cette offre a été bien absorbée et a rencontré une très forte demande.
Perspectives :
Nous anticipons un resserrement des spreads des MBS d’agences américaines dans la mesure où les flux des investisseurs en valeur relative et des banques devraient augmenter grâce profil de performance attrayant de ce secteur. Nous nous attendons à ce que les spreads des titres titrisés tendent vers leurs points bas, car ils se négocient actuellement à des niveaux proches des spreads des MBS d’agences. Les secteurs du crédit titrisé ont été parmi les plus performants en 2024 et en janvier 2025, et nous nous attendons à ce que cela se poursuive pendant le reste de l’année 2025. Les performances viendront essentiellement du portage des flux de trésorerie dans les mois à venir, en raison du niveau plus élevé des rendements en ce début de mois de février, mais aussi de la baisse potentielle des taux. Nous continuons de penser que les niveaux actuels des taux d’intérêt demeurent éprouvants pour de nombreux emprunteurs et vont continuer de pénaliser les bilans des ménages, ce qui engendrera des tensions sur certains ABS du secteur de la consommation, notamment ceux impliquant des emprunteurs à faible revenu. L’immobilier commercial reste également confronté à des difficultés en raison des taux de financement actuels. Le crédit hypothécaire résidentiel demeure notre secteur de prédilection en ce moment car nous n’hésitons pas à investir sur l’ensemble du spectre du crédit, alors que nous restons plus prudents vis-à-vis des ABS et des CMBS moins bien notés. Nous restons optimistes sur les valorisations des MBS d’agence qui sont attractives par rapport aux spreads des obligations d’entreprises Investment Grade et par rapport à leurs nouveaux historiques.